Crépuscule du tourment 2: Héritage

Auteur : Léonora Miano
Editeur : Grasset

On se souvient que Crépuscule du tourment 1, Melancholy, mettait en scène quatre voix de femme s' adressant successivement au même homme. Un choeur convergeant vers un centre silencieux. La structure de Crépuscule du tourment 2, Héritage, est absolument symétrique : elle part de l'intériorité de cet homme, autour duquel gravitent d'autres hommes subsahariens, vivants, morts ou entre les deux états : Les ascendants (un grand-père paternel ayant collaboré avec le régime colonial, un père violent à l'égard de son épouse mais tendre avec ses enfants...) ; Shrapnel, l'unique ami décédé dont il a adopté le fils ; Continent Noir, une manière d'ange terrestre dont la demeure lui sera un refuge, et d'autres encore. Amok et Schrapnel ont vécu en Occident et les questions d'identité, de race, de masculinité et de sexualité sont problématiques pour eux. C'est tout le parcours de ce livre : comment accepter un héritage, aussi pesant fut-il, pour être en mesure de le transformer ?
Du point de vue de la logique narrative, le deuxième volume commence où le premier s'achève : Amok apparait à l'instant où, ayant battu sa compagne Ixora, il la laisse pour morte. Horrifié par sa bestialité, il prend la fuite, se donnant pour prétexte la nécessité d'une confrontation avec son père dont il pense avoir hérité cette violence (« Le fauve caché dans l'âme des hommes de sa lignée »...) . Dans sa course, Amok est victime d'un accident de voiture qui le laisse inconscient : c'est par l'esprit qu'il traverse ses gouffres intérieurs, revisite son histoire intime et ses blessures secrètes. On revit avec lui les images de ce viol en réunion auquel il a refusé de participer,  de cet autre viol familial qu'il a subi dans l'enfance, des désordres sexuels de sa vie de jeune adulte, etc.
Interviennent aussi les principales figures féminines qui peuplent sa vie (les quatre femmes du premier volume vues cette fois par ses yeux,  mais aussi Ayezan, guide intérieur qui le ramènera à lui-même.) Le réalisme magique opère ici comme un outil permettant de représenter la plongée en soi d'Amok et son état de confusion,  en dehors des stricts moments d'introspection.
La structure formelle du roman est celle d'une pièce musicale avec couplets, chorus, couplet et coda, de sorte qu' au-delà de la « bande-son » explicite du texte, elle rappelle le jazz ou le néo-soul.

20,00 €
Parution : Mars 2017
320 pages
ISBN : 978-2-2468-5446-3
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