C'est quoi ce roman ?

Auteur : Corinne Devillaire
Editeur : Thierry Marchaisse

En soulevant le couvercle de cette famille, j'ai voulu que le lecteur, intrigué par ce qui y mijote, se retrouve piégé dans une cocotte-minute juste avant qu'elle n'explose.
Corinne Devillaire

19,00 €
Parution : Janvier 2014
272 pages
ISBN : 978-2-3628-0045-0
Fiche consultée 38 fois

Extrait

DÉPOSITION DE CLARISSE

C'est maman qui a proposé la halte chez Malou, au retour de nos vacances en Autriche. Mais on ne peut pas lui en vouloir. Elle croyait bien faire. Jusque-là, je n'avais vu la mère de papa qu'une seule fois : le jour de son mariage avec son dernier mari. Je ne m'en souviens presque pas. C'était il y a longtemps. J'étais trop petite. Pierre, lui, était dans le ventre de maman. Ça se voit sur la photo. S'il est exact que les foetus entendent tout, lui aussi a assisté à la réception, d'une certaine façon. Mais je ne crois pas qu'à ce stade de la gestation, la mémoire soit vraiment opérationnelle. Bref, mon petit frère ne pourrait pas non plus vous raconter grand-chose. Par contre, Clothilde, notre grande soeur, a une mémoire de pachyderme. Elle avait déjà sept ou huit ans. Si elle était en état de témoigner, elle vous raconterait tout dans les détails. J'espère que bientôt elle ira mieux !
Je précise que papa n'est pas particulièrement proche de sa mère. Avec le recul, je me demande même pourquoi il s'est cru obligé d'accepter cette escale. Peut-être pour équilibrer la balance, puisqu'on venait de passer huit jours chez mes grands-parents maternels. Mais je crois surtout que cette proposition inattendue l'a pris de court et qu'il voulait éviter les questions de maman. Elles n'auraient pas manqué de pleuvoir s'il avait refusé de faire ce petit détour. Il faut toujours qu'elle décortique tout...

Non. C'est juste une déformation professionnelle : elle est psy. Quand elle nous écoute, c'est très agaçant, l'impression qu'elle donne de connaître à l'avance la fin de nos phrases. Avec elle, difficile de se sentir chez soi dans sa tête. Papa a trouvé la parade : il ne dit plus rien.
En attendant, il faut reconnaître que maman a sûrement raison au sujet de Malou, quand elle prétend que c'est à cause d'elle si nous sommes une famille sans attaches et que tout ça est arrivé. Il paraît qu'il n'y a pas d'interdit qui vaille, lorsque les liens de parenté ne sont pas clairement définis au départ. Du côté de papa, ils ne l'étaient pas, justement. D'ailleurs, il s'est toujours plaint d'être né de «mère inconnue» ! Alors, non pas que je veuille défendre Clothilde, mais dans ce contexte, difficile pour nous trois, au début, de considérer Malou comme notre grand-mère.
Je me souviens parfaitement de la scène de notre arrivée. Papa s'annonce à l'interphone. Les grilles de la propriété s'entrouvrent aussitôt. Nous roulons à travers le parc. La minute jusqu'au perron est silencieuse dans la voiture : nous sommes tous impressionnés par l'interminable allée de platanes. Pierre veut savoir si «la dame» habite un château hanté. Maman répond que c'est elle le fantôme, puisqu'elle ne donne plus de nouvelles et n'en prend pas de nous depuis très longtemps.

Informations sur le livre