Reconstruire l'ordre institutionnel international

Auteur : Samantha Besson
Editeur : Fayard
En deux mots...

À l’heure où les États sont toujours plus concurrencés par des institutions nombreuses aux pouvoirs divers sur la scène internationale, Samantha Besson invite à re-poser la question institutionnelle en droit international pour contribuer ainsi à reconstruire l’ordre institutionnel mondial.

Juriste, spécialiste de droit international public et de droit de l’Union européenne, Samantha Besson est depuis 2004 professeure à l’université de Fribourg en Suisse. En 2019, elle a été nommée professeure au Collège de France, titulaire de la chaire Droit international des institutions.

12,00 €
Parution : Avril 2021
80 pages
ISBN : 978-2-2137-1804-0
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Présentation de l'éditeur

Les États n’agissent plus seuls sur la scène internationale. Interviennent désormais à leurs côtés, voire parfois à leur place, d’autres institutions comme les organisations internationales, les entreprises multinationales, les organisations non gouvernementales, les régions, ou encore les villes globalisées. Or, on ne dispose d’aucune indication claire, et encore moins d’un « droit international des institutions », permettant de répondre aux trois questions essentielles de l’organisation sociale et politique que sont la représentation, la règlementation et la responsabilité. Quelles institutions peuvent agir pour qui sur le plan international ? À quelles conditions leurs décisions peuvent-elles prétendre lier juridiquement, et avoir la légitimité de le faire ? Et, quelles institutions doivent répondre envers qui, et comment, de la violation du droit international ? Le temps est venu de reconstruire l’ordre institutionnel international.

Extrait

En 1516, quelques années avant de fonder le Collège de France, François Ier conclut le traité de Fribourg dans la ville du même nom en Suisse. Ce traité, mieux connu sous le nom de « Traité de paix perpétuelle », lie la France aux treize cantons qui constituent la Confédération helvétique d’alors. Si ce traité, d’ailleurs seul « traité de Fribourg » que connaisse le droit international, y est conclu, c’est qu’à l’époque le canton de Fribourg est la région d’origine de nombreux mercenaires monnayant leurs services aux princes européens. En cette période de quasi-sécession entre cantons confédérés, ce canton bilingue est aussi devenu l’intermédiaire politique privilégié de la France.
Renouvelé en 1521, le traité de Fribourg aura garanti la paix entre nos deux pays et dans la région durant près de deux siècles. Aujourd’hui, l’histoire populaire ne retient toutefois de cette période qu’une victoire militaire, celle de Marignan. Pourtant, si la bataille de Marignan est désormais commémorée comme une victoire (des deux côtés de la frontière franco-suisse, d’ailleurs !), c’est bien parce que le droit international a fait son œuvre. Il aura permis aux deux parties de construire ce qui, par la force du droit international, transforme même les perdants en vainqueurs : un ordre institutionnel régional à même de leur garantir paix et prospérité. Pour la Suisse, le traité marque le début de sa neutralité en droit international, mais surtout de son autonomie diplomatique. Il contribue donc à l’instituer en tant qu’État et orchestre ses premiers pas sur la scène internationale. La France, quant à elle, en retire l’exclusivité du mercenariat suisse et le contrôle, au moins partiel, du territoire milanais tant convoité.
À la lumière de l’importance pour nos deux pays de ce traité international du XVIe siècle, il est réconfortant que ce soit par l’entremise d’une Suissesse, officiant à l’université de Fribourg de surcroît, que le droit international revienne aujourd’hui au cœur des enseignements du Collège de France. L’on pourrait aussi, bien sûr, sourire à l’idée que ce haut lieu de l’humanisme créé par François Ier s’ouvre (même si ce n’est pas la première fois, bien sûr) aux Suisses, que Machiavel décrivait comme étant « sans humanisme ». Comme me l’a rappelé Patrick Boucheron avec délicatesse, toutefois, Machiavel signifiait ainsi sa grande admiration au citoyen-soldat suisse : un citoyen resté à l’écart d’une culture élitaire fondée sur l’individualisme humaniste.

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