Couverture du livre : Angelo

Avis sur le livre : Angelo

Connaîtrait-on l’existence d’Ângelo de Lima (1872-1921) si Fernando Pessoa ne l’avait soustrait à l’oubli en le publiant, en 1915, dans la revue d’avant-garde Orpheu ? A partir de quelques « traces météoriques » – une photographie, des lettres, un recueil posthume de 43 poèmes –, Gilles Ortlieb s’est passionné pour ce « fou littéraire ». A Porto, à ­Lisbonne et jusqu’au Mozambique, il a mené l’enquête sur ce personnage fantomatique. Il a interrogé les fiches cliniques, a lu la brève autobiographie rédigée en 1902 à la demande des médecins, a visité l’hôpital « panoptique » de Rilhafolles (devenu hôpital Miguel-Bombarda) où Ângelo fut interné vingt ans, cherché sa tombe au cimetière de Prazeres. « Un enfant contemplatif, un élève dissipé, un artiste peintre alcoolique à ses heures, cela ne suffit pas, en soi, à fabriquer un fou. » Fallait-il voir dans la fragmentation de son langage poétique un signe de son entrée dans la démence ? Même si, dans cette obsédante rêverie littéraire, il ne recueille que « des éclats de mica dans une semi-obscurité », Gilles Ortlieb édifie un magnifique « tombeau » pour un poète « de la marge » : on se souviendra d’Ângelo. M. Pe.

Le Monde