La piscine naturelle
François Vergne a rassemblé deux récits traitant du même thème - la perte d'un être cher (une grand-mère, une mère) vécue par deux femmes à deux âges différents de leur vie.
Dans le premier, La piscine naturelle, une jeune fille est en vacances d'été chez sa grand-mère, dans le Sud de la France, le « causse ». Il y a là Madame Angèle, la fidèle servante, une tante et ses enfants... La jeune fille et ses cousines font la connaissance d'un ouvrier agricole, et de son fils, grand gamin rustique. Elles retrouvent celui-ci à la baignade de la rivière, l'observent ainsi que d'autres garçons du cru, acceptent d'aller avec eux au bal du village, un soir... L'espace d'une saison, la jeune fille découvre la sexualité avec l'adolescent maladroit. Puis la grand-mère - soleil fatigué de ce vert paradis - meurt et, pour la première fois, la jeune fille fait l'expérience mystérieuse du deuil.
Dans le second, Une journée au printemps, une autre femme, adulte et mère celle-là, médite dans le même cadre campagnard sur la mort de sa propre mère. Si la douleur est ressentie différemment - moins surprenante, à la fois redoutée et « attendue » en quelque sorte -, la maturité ne change rien à l'épreuve, qui emporte au contraire un sentiment de perte plus inexorable encore.Dans ce monde rural presque immuable de la France profonde, ces deux femmes se trouvent, chacune à son tour, soudain blessées par la disparition d'une autre, très vieille et tant aimée; ainsi confrontées à l'image de la fin naturelle et néanmoins révoltante qui tôt ou tard les atteindra elles aussi, bien que le temps semble, surtout au début de la vie, s'écouler avec une lenteur infinie et trompeuse.
En s'attachant aux gestes quotidiens, aux minuscules événements, simples et merveilleux, grâce auxquels les minutes et les jours ont parfois l'air de s'immobiliser magiquement dans certains ciels d'été, François Vergne réussit à susciter un univers apparemment banal, subtil et d'une sensualité panthéiste, que transfigurent des moments éblouissants de pure épiphanie.