XXV Fables des animaux

Auteur : Estienne Perret
Editeur : Presses Universitaires de France - PUF

En 1578, dans une Anvers naguère encore capitale économique du monde occidental, désormais déchirée par les guerres entre calvinistes hollandais et catholiques espagnols, sortent des très célèbres presses de Christophe Plantin ces XXV Fables des animaux en langue française, signées d'Estienne Perret, citoyen de la ville. Elle sont somptueusement illustrées par l'un des graveurs en taille douce qu'employait l'éditeur : Abraham de Bruyn, Pierre Huys, Christophe Van den Broeck, les frères Wierix ? Le talent de l'artiste anonyme force l'admiration. (...) D'emblée, se parant fièrement du titre de « citoyen d'Anvers » (et donc d'une « république » libre), Estienne Perret place son recueil sous le signe de la méditation pénitentielle et de la considération anxieuse du salut : « En ce livre verrez belle comparaison de l'homme à l'animal, qui vit contre raison », avertissement suivi d'une exhortation en vers à éviter le châtiment de Dieu et à mériter sa grâce, par le combat contre la chair qui fait des hommes des animaux dangereux et par la soumission à la raison qui, seule, nous rapproche du Créateur et de la gloire éternelle promise à ses fidèles. Suit le Psaume VIII, paraphrasé en alexandrins.L'essence de la fable ésopique est bien là, comparaison ou similitudo entre moeurs animales et moeurs humaines, avec son utilité éthique, mais les ornements chers aux Italiens comme ils le seront à La Fontaine, la voluptas de l'oreille et de l'intelligence, qui insinuent la leçon morale sans avoir à persuader lourdement, ont disparu du programme du fabuliste, ou sont abandonnés au graveur. (...) Chacune de ses fables, formant un tout typographique sur la même page, est construite comme un emblème à cinq étages : un titre en majuscule, une brève moralité en prose, une narration animalière en alexandrins tirée d'Esope ou de type ésopique, une « allusion » qui en commente le sens moral, et une citation versifiée d'un passage de l'Ancien ou du Nouveau Testament. (...) Avec Perret, dans l'Anvers encore pantelante de l'iconoclasme calviniste et de la « Fureur espagnole », il faut apprendre à vivre aux aguets, dans un monde aussi brutal et rempli de pièges mortels qu'une ferme d'animaux sans fermier, toujours prêt d'un instant à l'autre à être égorgé en dépit de toutes les précautions. Le Christ en croix est seul à donner un sens à une humanité assiégée et persécutée par l'animalité perfide et meurtrière qu'elle porte en elle depuis Adam. Extrait de la préface de Marc Fumaroli, de l'Académie Française"Les 25 grandes planches qui ornent l'ouvrage de Perret sont anonymes mais démontrent la persistance de certains motifs dans l'illustration des fables d'Ésope. Elles s'inspirent des 108 planches gravées par Marcus Gheeraerts pour De warachtige Fabulen der Dieren, imprimé en 1567. Le graveur des planches de Perret, loin d'avoir reproduit de manière servile l'oeuvre de Gheeraerts, a fait preuve d'inventivité devant transformer les figures initiales d'un petit format oblong pour les adapter à cet infolio. Ainsi, non seulement les figures sont inversées, par rapport à leur modèle de 1567, mais elles sont aussi dorénavant disposées en hauteur. La comptabilité de Plantin, ne conserve aucune trace du paiement des gravures ; il se pourrait que Christophe Plantin ne se soit qu'occupé de l'impression du texte et qu'Estienne Perret, agissant comme éditeur, ait fourni le papier et fait imprimer les planches à ses frais. Estienne Perret, dont on ne connaît aucune planche, en aurait-il assuré lui-même l'exécution, ou a-t-il plutôt fait appel à un artiste de la maison Plantin : Pieter Huys ? A moins que Marcus Gheeraerts, revenu à Anvers en 1577 après un exil en Angleterre, se soit vu confier la transformation des ses propres planches ?

29,50 €
Parution : Novembre 2007
72 pages
ISBN : 978-2-1305-6456-0