Face aux migrants : Etat de droit ou état de siège

Selon la dernière enquête de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, plus de 50 % des Français considèrent qu'il y a trop d'étrangers en France. Ainsi la xénophobie semble-telle encore tenir la dragée haute à l'antiracisme contemporain. Gérard Noiriel y voit la nécessité pour les élites - intellectuels, journalistes, politiques - de repenser fondamentalement leur stratégie de lutte contre le racisme.
Au coeur de sa pensée : l'idée que le langage est crucial. Crucial d'abord dans la fabrication des stéréotypes de stigmatisation. Or, les médias, le verbiage politique, le discours d'actualité sont de véritables machines à stéréotypes. Crucial ensuite car les plus démunis en sont les victimes, incapables d'user des rhétoriques « convenables ». Doter chacun, dans les classes les plus populaires, des armes de la rhétorique, voilà ce que Noiriel ambitionnerait de réaliser pour casser la stigmatisation par le langage. Parce qu'il est trop facile de dire que le racisme, c'est pour les pauvres ! Gérard Noiriel fixe ici un véritable pacte démocratique. Disqualifier tout discours étant perçu comme stigmatisant par les populations concernées.
Police de la pensée ? Victor Hugo ne s'est-il pas lui-même interdit d'user du terme de « populace » dans ses livres lorsqu'un lecteur en faisant partie lui fit remarquer le péjoratif de la désignation ? Pour cela, il faut un intellectuel collectif solidaire s'accordant sur les faits pour déjouer les fantasmes et les abus de langage. Cet intellectuel est possible et il a un rôle majeur à jouer ces prochaines années.
Après avoir fait le point sur l'histoire du racisme dans son précédent ouvrage, Noiriel affûte ici les armes pour lutter contre le fléau majeur des années à venir : un racisme d'autant plus destructeur qu'il ne passe plus par la force de l'argument, mais par la contamination médiatique des idées toutes faites qui associent, par exemple, l'immigration et la délinquance...