Amour, gloire et dentiers

Auteur : Marc Salbert
Editeur : Le Dilettante

De l’action, de l’humour, de la chlorophylle, des relations sexuelles hors mariage et un casting éblouissant. Bientôt près de chez vous !

11,70 €
Parution : Avril 2017
256 pages
ISBN : 978-2-8426-3901-3
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Extrait

Le cardiologue peignait sa barbe avec les doigts de sa main gauche tout en parcourant les résultats de l’électrocardiogramme.
– Ça n’est pas très satisfaisant monsieur Bordier, dit-il en laissant tomber la feuille sur son bureau. Vous avez le cœur fatigué, on a décelé une arythmie assez prononcée. Vous consommez de l’alcool ou des excitants?
– Avec modération.
– Excellente idée... Je ne veux pas vous alarmer mais je vous conseille d’éviter les activités physiques intenses et de retenir vos efforts. Vous êtes au Jardin d’Éden il me semble, un excellent établissement qui a déjà connu plusieurs centenaires. Je vous souhaite d’intégrer ce club ! Alors de la pondération en tout, n’oubliez pas! dit le cardiologue en se levant pour le raccompagner.
Quel imbécile pensa Stanislas. Devenir centenaire ? Pour apparaître édenté dans le journal local? Non merci! Mieux valait brûler la chandelle par tous les bouts et tomber raide, d’un coup.Voilà une issue un peu plus digne qu’un lent naufrage!
– Vous avez vu La Fureur de vivre ?
– Pardon?
– Ça ne m’étonne pas, au revoir monsieur !

Stanislas sortit du centre de soins, Sami l’attendait en fumant une cigarette, adossé au van. Par la fenêtre il aperçut une enfant d’une dizaine d’années, la fille de Claire, il y avait un air de famille, les traits du visage, les yeux, les gènes féminins l’avaient emporté comme bien souvent. Elle filmait la rue avec la caméra de Lucien qu’elle braqua sur lui.
– Bonjour mademoiselle, moi c’est Stanislas.
– Bonjour monsieur, moi c’est Charlie... Dites, vous voulez pas dire à Sami qu’on a encore le temps d’aller se baigner?
– Vois ça avec ta mère, appelle-la, moi je suis les consignes, on m’a demandé de te ramener, je te ramène.
– Mais elle répond pas, elle doit être en réunion, allez juste un petit bain.
– Qu’est-ce que vous en pensez ? demanda Sami à Stanislas. – Moi, plus tard je rentre dans ce trou mieux je me porte, je vote pour la plage, jusqu’à minuit !
– Bien, je m’incline, je dirai que vous m’avez forcé... Mais faut d’abord qu’on récupère les deux vieux.
– À l’hippodrome?
– Non ils sont partis chez une cousine, rue Albert-Fracasse. Sami démarra en direction de la place Morny. La rue Albert-Fracasse était semée de maisons de deux étages avec des boutiques au rez-de-chaussée. Le van passa devant un salon de toilettage pour chiens, une mercerie à l’enseigne du Bouton enchanté, un fleuriste et il s’arrêta devant la devanture d’un salon de massage. Sami vérifia sur la plaque, c’était bien l’adresse de la cousine. On pouvait lire sur la vitrine : chez Suzie, relaxation, détente, massages californiens.
– Ah d’accord, la cousine est dans le médical ! dit Sami.
– C’est pratique, j’irai peut-être la voir aussi, je me sens un peu ankylosé.
– Moi aussi, à force de porter mon cartable de cinquante kilos, j’ai mal partout.
– Ah non, fit Sami. À mon avis, elle est plutôt spécialisée dans l’adulte, voir même le vieux, pour être raccord avec la population locale.
– Sami, je peux aller les chercher ?
– Euh... Non, on va rester là, je pense qu’ils vont sortir sous peu.
– Mais on perd du temps pour la plage !
– Tu sais Charlie, dit Stanislas, il faut respecter les retrouvailles familiales, on peut bien attendre quelques minutes.
À cet instant la porte du salon s’ouvrit et ils entendirent des cris.
– Salopard! hurlait une femme.Tenez-le!
Un colosse chauve dont le ventre dépassait d’un tee-shirt trop court apparut dans l’embrasure, tirant derrière lui Maurice et Lucien qui essayaient de le retenir par les poignets.
– Charlie tu restes dans la voiture, dit Sami en se précipitant dehors, suivi par Stanislas.
Une bagarre, j’adore ! se dit-elle en saisissant la caméra, et elle commença à filmer au moment où Suzie sortait à son tour. Elle portait une mini-jupe de cuir noir, des cuissardes et un justaucorps transparent qui ne cachait rien de son abondante poitrine, une tenue de travail assez surprenante pour une sexagénaire. Suzie avait de la voix et un vocabulaire plutôt fleuri, on l’entendait jusqu’à Cabourg.
– Tu crois que tu vas t’en tirer comme ça, sale fiotte ! Tu me déglingues et tu pars sans payer ? Tu me prends pour l’Armée du salut ou quoi? Envoie la monnaie ou j’appelle ta femme !
Le colosse n’avait pas l’air convaincu par son argumentaire.
– Lâche-moi, vieille radasse ! T’auras pas un rond, t’es trop moche, c’est toi qui devrais envoyer les biftons, pour une fois que tu vois un vrai mec!
– Calmons-nous ! intervint Stanislas. Tout travail mérite salaire, vous la payez et on se quitte bons amis.
Le colosse se débattait avec à ses basques Lucien, Maurice et maintenant Sami qui lui barrait la route.
– T’es qui toi ? Son micheton ? Comment t’oses refourguer de la barbaque avariée aux clients? C’est une honte!
– De la barbaque avariée???
Le sang de Suzie ne fit qu’un tour, elle se planta devant lui et lui décocha un coup de botte dans les parties.
– Prends-toi ça dans les noisettes! Ça t’apprendra la politesse !

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