Voyage entre Cieux et Enfers II: Les sentiments innocents

Ainsi, j’avais vu juste : c’était bien cette fameuse Elinor. Elle était vraiment sublime, vous eussiez dit qu’elle était une demi-déesse, qu’elle était née de Dieu, d’Aphrodite ou de Zeus tant elle brillait de beauté divine. Elle était précisément le genre de magnificence qu’on apercevait parfois dans un rêve, vous savez, ces rêves qu’on a du mal à quitter au réveil. Mais à la différence, elle était bien sous mes yeux en chair et en os, j’en eus mis ma main à couper, même s’il paraissait aller de soi qu’elle n’était rien moins qu’humaine, qu’elle était davantage que cela, qu’elle était mieux encore. A présent, en mesurant sa sublimité dans toute sa splendeur, je comprenais tout à fait le béguin que le prétentieux Henry Pratt vouait pour elle. Je m’apercevais qu’elle m’ensorcelait moi-même de la manière la plus périlleuse et la plus onirique. Pis que cela : elle me charmait au-delà des mots et des paroles. Et ce sortilège, je vous le jure, n’était pas le fruit d’un délire de mon imaginaire ou je ne sais quelle idéalisation produite sous l’effet de l’alcool car je n’avais rien bu ce soir-là. Pas un seul soupçon de liqueur. — C’est un joli prénom, mademoiselle, m’entendis-je lui dire comme si je ne contrôlais pas mes paroles. J’étais poussé par l’Amour, par les sentiments. Des sentiments innocents.