Riley s'attaque au Vatican

Arkady Kouznetsov était fatigué. La journée avait été longue, et plus stressante que le simple désagrément ordinaire d'avoir affaire à des touristes. Il n'aimait pas les touristes. Mais il avait appris à les supporter. Il était bien obligé. Ils affluaient par milliers à Saint-Pétersbourg pour voir les trésors artistiques du musée de l'Ermitage, où il travaillait. Aucun ne parlait russe, bien sûr. La plupart se contentaient de parler dans leur propre langue, mais plus fort, comme si le fait de crier suffisait à transformer des mots étrangers en mots russes. Arkady était toujours poli avec eux, aussi bêtes et bruyants soient-ils. Ça faisait partie du boulot. Mais les journées de forte affluence le fatiguaient particulièrement.
Rarement autant que celle-là, cependant. Bien entendu, il y avait eu le lot habituel de visiteurs. C'était l'été, la saison où ils arrivaient par troupeaux entiers des quatre coins du monde. Mais, ce jour-là, il y avait eu davantage à gérer que d'horripilants touristes étrangers. Ce jour-là, il y avait eu une « menace crédible » – selon l'expression de son chef –, laissant penser que quelqu'un allait essayer de voler un des tableaux qu'Arkady et ses collègues passaient leurs journées à surveiller. Quelqu'un s'apprêtait apparemment à voler un Van Gogh intitulé Les Femmes d'Arles. Arkady ne comprenait pas pourquoi. Il n'aimait pas ce tableau. Il trouvait que les couleurs bavaient de partout. Il préférait quand une peinture avait l'air d'une peinture. Et qu'on reconnaissait ce qu'il y avait dessus, pas comme là, où c'était tout embrouillé. Mais ce n'était pas le sujet. L'important était que quelqu'un avait l'intention de voler cette œuvre, à l'Ermitage, pendant qu'elle était sous sa surveillance ! Et par fierté aussi bien nationale que professionnelle, Arkady ne pouvait laisser faire ça.