Le couple parfait n'existe pas: Éloge de l'imperfection amoureuse

Auteur : Cécilia Commo
Editeur : Flammarion

Il était une fois… Ainsi commence l’aventure amoureuse.
Mais comment se poursuit-elle dans la vraie vie ? Face au quotidien, à l’arrivée des enfants ? Face aux baisses de libido, aux disputes, à l’infidélité ? Comment s’arrange-t-on lorsque l’on s’unit seulement pour le meilleur, sans vouloir le pire ?
Loin des guides pratiques ou manuels de survie à destination des couples, l’auteur analyse ici nos habitudes, nos travers et nos attentes au sein du couple moderne, qu’il soit hétérosexuel ou homosexuel. Avec un regard lucide, mordant parfois mais toujours bienveillant, elle nous entraîne dans une réflexion sur la représentation que l’on se fait du couple en général et de notre couple en particulier. À la lumière des confidences faites dans son cabinet, elle nous révèle comment la perfection conjugale se heurte à la réalité et pourquoi elle tend à nous rapprocher de l’échec bien plus qu’à nous en éloigner.

18,00 €
Parution : Janvier 2022
240 pages
ISBN : 978-2-0802-6470-1
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Extrait

Prologue
Aussi moqué que fantasmé, le couple idéal fait beaucoup parler de lui, parfois même de façon paradoxale. Tandis que l’on raille narquoisement sa quête utopique, on se rue sur les ouvrages censés nous divulguer les « secrets » de ces couples qui durent, de ces couples heureux. On tente de réussir son couple à l’aide de fiches et de recettes détaillées, on le perfectionne avec des cahiers d’exercices, on le répare avec des outils, on le sauve avec des programmes intensifs. On redouble d’efforts pour apprendre une nouvelle langue amoureuse, on découvre ébahis qu’il existe une « intelligence érotique ». Avides de conseils, de clés et de solutions, nous succombons tous à la proposition qui nous est faite : certains vivent heureux, ensemble, très longtemps... Voulez-vous en être ?
Moi-même, par cet ouvrage, je n’échappe pas à la curiosité de pénétrer ce fantasme idéalisé d’un amour nimbé d’évidence, de durabilité et de bonheur ; un fantasme que l’on cherche à éprouver sans en avoir l’air, auquel il est pourtant difficile de se soustraire tant il infuse notre inconscient depuis toujours.
Dès le IIe siècle de notre ère, surgit sous la plume du philosophe Apulée un conte romanesque, la légendaire histoire d’amour entre la splendide princesse Psyché et l’inaccessible, mais tout aussi sublime, dieu Éros. Tous les ingrédients du mythe amoureux sont là : un amour foudroyant, même si improbable, transgressif puisque l’une est humaine et l’autre est un dieu, de la jalousie, des séparations, des mises à l’épreuve de la force amoureuse, du chagrin, de la souffrance, des retrouvailles. Bref tout y est, jusqu’à la fin où, au terme d’innombrables péripéties, les deux amants s’unissent pour toujours. Cette mythique histoire d’amour rapportée dans Les Métamorphoses n’est, en définitive, qu’une des multiples versions d’un chœur narratif souvent analogue dont seule la fin, parfois tragique, varie. Cependant, pour ceux qui restent en vie, passée la passion flamboyante, on ne sait pas grand-chose ; aucun conteur ne se hasarde à dévoiler la suite...
Psyché et Éros vécurent-ils heureux jusqu’à la fin des temps ? Se sont-ils disputés, méprisés, insultés ? Ont-ils eu des baisses de libido? Ont-ils menti pour roucouler avec un autre? Sont-ils demeurés ensemble par crainte de l’abandon ? Apulée s’est bien gardé de nous le raconter, car parallèlement à ces amours rocambolesques, l’inflexible constitution patriarcale d’un couple a longtemps relaté une tout autre histoire conjugale, nettement moins romanesque : la sélection du conjoint découlait alors bien plus d’une transaction raisonnée que d’une quelconque inclination.
Jusqu’au jour où l’émancipation des femmes a transformé la structure séculaire du couple, obligeant l’aventure conjugale à emprunter des chemins inédits. Eu égard à ce nouveau territoire sentimental – fondé sur le libre choix amoureux, la parité homme-femme, l’exaltation de l’individualité et la disparition des revendications familiales –, nous aurions pu choisir d’être modestes. Cependant il n’en est rien, au contraire ! La nature ayant horreur du vide, selon l’expression consacrée, l’allègement des contraintes oppressives qui pesaient sur les conjoints s’est rapidement retrouvé compensé par le poids de leurs attentes.
Accéder (enfin !) à une pluralité de modèles amoureux jusque-là illicites, empêchés ou stigmatisés, nous a rendus exigeants et ambitieux, adeptes du « tout ou rien » et déterminés plus que jamais à ne rien concéder en matière de bonheur conjugal. Cet effet, que les observateurs des relations amoureuses pointent comme paradoxal – libres, mais enchaînés au modèle du couple idéal – fait écho à une économie de marché bien rodée où liberté et concurrence se combinent pour produire une croissance économique, supposée satisfaire tout le monde.

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