Voyages de noces

Auteur : Val McDermid
Editeur : Flammarion

Une femme célibataire, une voiture en feu, et ce même schéma qui se répète : un homme charmant s'introduit à des mariages, y repère sa victime et la courtise pendant des semaines avant de l'emmener dans son cottage isolé, loin de tout témoin potentiel. La nouvelle brigade d'élite de Carol Jordan se met sur la trace de ce tueur méticuleux qui ne laisse rien au hasard. Mais l'enquête se mêle aux ombres du passé de Carol qui, plus que jamais, aura besoin du soutien indéfectible du profileur Tony Hill. En nous invitant à nous faufiler dans les coulisses de la scène de crime, Val McDermid nous tient en haleine, spectateurs fascinés, jusqu'au coup de théâtre final. Cet épisode charnière de la série bouleversera le destin du duo emblématique.

22,00 €
Parution : Juin 2020
512 pages
ISBN : 978-2-0815-0042-6
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Extrait

Si Kathryn McCormick avait su qu’il lui restait moins de trois semaines à vivre, elle aurait sans doute fait davantage d’efforts pour profiter du mariage de Suzanne. Mais comme à son habitude, elle s’était laissé gagner par la déception et la résignation en essayant toutefois de ne pas paraître trop triste tandis qu’elle observait les autres invités danser, insouciants.
Ça se passait exactement comme au travail. Là-bas aussi, Kathryn se sentait exclue. Même si son poste de responsable administrative ne lui permettait pas d’exercer beaucoup de pouvoir, c’était suffisant pour qu’on la tienne à l’écart. Kathryn le ressentait chaque fois qu’elle entrait dans la kitchenette pour se préparer un café : quel que fût le sujet de conversation en cours, celle-ci s’interrompait aussitôt ou bien glissait vers le superficiel.
Imaginer que la situation aurait pu être différente aujourd’hui avait été une erreur stupide. Elle avait lu un jour une phrase sur la folie qui l’avait marquée : être fou, c’est refaire tout le temps la même chose en espérant un résultat différent. Si on s’en tenait à cette définition, elle était sans aucun doute folle. Être assise à l’écart de la fête en ce samedi soir, tout en espérant se retrouver au milieu des rires et des conversations, était une attitude typique chez elle et ne pouvait conduire qu’à un prévisible échec.
Kathryn jeta un coup d’œil à sa montre. On dansait depuis une demi-heure seulement mais elle avait l’impression que ça durait depuis une éternité. Nikki de la compta se déhanchait comme une danseuse de pole dance en face de Gerry le rouquin qui la regardait bouche bée. Anya, Lynne, Mags et Triona dansaient en petit groupe toutes les quatre, coudes près du corps, se trémoussant et remuant la tête en rythme. Emily et Oli dansaient de façon synchrone sans se quitter des yeux et en se souriant comme des idiots. Des idiots qui allaient probablement rentrer ensemble à la fin de la soirée.
Elle ne savait plus vraiment quand elle avait fait l’amour pour la dernière fois. Niall et elle étaient séparés depuis plus de trois ans. Mais le chagrin qu’elle ressentait était encore vif. Il était rentré à la maison un soir, l’haleine chargée de bière et la peau légèrement suintante.
— On m’a proposé un boulot à Cardiff. Pour y diriger ma propre équipe de concepteurs! avait-il lancé avec enthousiasme.
— C’est super, chéri !
Kathryn était descendue de son tabouret de cuisine pour l’enlacer tout en essayant de faire taire cette petite voix dans sa tête qui lui disait : « Cardiff ? Qu’est-ce que je vais bien pouvoir foutre là-bas ? »
— Le salaire sera plus élevé aussi, avait-il ajouté, sans répondre à son câlin, le corps étrangement raide.
— Ouah ! Quand est-ce qu’on part, alors ?
Il s’était écarté d’elle. Le cœur de Kathryn s’était serré dans sa poitrine.
— C’est le problème, Kath, avait-il répondu en baissant les yeux. Je veux y aller tout seul.

Ce qu’il disait n’avait aucun sens.
— Comment ça, tout seul ? Tu vas seulement revenir les week-ends ? C’est idiot, je peux trouver un travail là-bas avec les compétences que j’ai.
Il avait reculé.
— Non. Écoute, je ne sais pas comment te dire ça... Je ne suis pas heureux et ça fait un moment que ça dure. Partir est la meilleure solution pour nous deux. Pour démarrer autre chose. On peut tous les deux commencer une nouvelle vie.
Et ça s’était terminé comme ça. Enfin, pas tout à fait. Il y avait eu les cris, les larmes et elle avait tailladé tous ses caleçons Calvin Klein, mais ça n’avait rien changé. Elle avait perdu l’homme qu’elle aimait, sa dignité et son foyer parce que la moitié de leur jolie maison de Bradfield appartenait à Niall et qu’il avait insisté pour la vendre. À présent, elle vivait dans un petit appartement d’un immeuble des années soixante trop près de là où ils avaient vécu ensemble. Ç’avait été une erreur de s’installer si près de l’endroit où elle avait été heureuse, de cette maison devant laquelle elle devait passer tous les matins pour aller prendre le tram. Elle avait essayé de faire un détour de dix minutes pour l’éviter, mais c’était encore pire ; ça l’avait fait souffrir encore plus. Parfois, le couple qui avait acheté la maison en sortait au moment où elle passait devant et ils lui adressaient un petit signe de la main en souriant d’un air gêné.
Depuis, Kathryn avait fait quelques tentatives pour rencontrer de nouveau quelqu’un. Elle s’était inscrite sur un site de rencontres en ligne et avait consulté des dizaines de profils. Mais quand elle s’imaginait côtoyer ces hommes, aucun ne semblait crédible. Un des anciens collègues de Niall lui avait envoyé un texto pour l’inviter à dîner. Ça ne s’était pas bien passé. Il s’était clairement imaginé qu’elle apprécierait une petite partie de jambes en l’air et n’avait pas vraiment apprécié qu’elle l’envoie balader. Aux quarante ans de son cousin, elle avait sympathisé avec un type gentil originaire d’Irlande du Nord. Elle avait fini dans son lit, mais ça n’avait pas été un franc succès et il était retourné à Belfast sans tenir sa promesse de la rappeler.

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Poche (Mai 2021)
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