Je m'appelle François

Auteur : Charles Dantzig
Editeur : Le Livre de Poche

Je m'appelle François » est peut-être la seule phrase où je n’aie jamais menti dans ma vie. Elle m'a servi de digue. Tout le monde a besoin de mentir à un moment ou l’autre. J'ai voulu être un autre moi, un moi meilleur, le monde ne l’a pas permis. » Né prés de Tarbes, entre un père qui a déserté la maison et une mère un peu plus que volage, avec qui il aura un compte de tendresse à régler toute sa vie, François Darré apprend tôt que la vie sourit aux audacieux. Alors, ce jeune homme trop sensible sera séducteur, jouant de son physique de brun aux dents si blanches, empruntant les identités les unes derrière les autres, faisant peau neuve, conservant comme un talisman ce prénom de François. Fuir Tarbes, d'abord. Puis à Paris ensorceler une famille aristocratique crédule et riche. A Los Angeles, s'appeler François Depardieu, rouler en décapotable, pratiquer l'escroquerie d'envergure. Tenter d'aimer avant de se faire arrêter comme un malfrat, triompher de la prison par une revanche médiatique, un livre, des émissions, des compliments et des insultes, devenir le voyou qu'on voudrait recevoir chez soi. Jusqu'où ira-t-il ? Jusqu'au meurtre, vraiment ? Enfin, qu'ira-t-il faire à Dubaï, dans une mer que surplombent les gratte-ciels construits en une nuit, « le nez vers les étoiles pour oublier notre passé de boue » ? Charles Dantzig nous donne son meilleur roman, le plus ouvert, le plus moderne, le plus émouvant aussi. Son héros ressemble au Zélig des époques médiatiques, à l’aise devant une caméra ; cet enfant des années 80 a la débauche élégante des personnages de Truman Capote, frayant avec la pègre, couchant avec la bourgeoisie, lui qui n'appartient à aucun milieu. François joue et se joue de nous, dans un roman virtuose, beau comme le chagrin.

6,60 €
Parution : Janvier 2010
Format: Poche
280 pages
ISBN : 978-2-2531-2546-4
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Extrait

Premier Chapitre
François Darré, " l'homme qui a volé trois milliards "
La première fois que vous l'avez vu, c'était à la télévision. Il était vêtu d'une combinaison orange, assis à une table blanche, dans une pièce beige. " François Darré, le… " Cette émission de télévision devint " culte " sur-le-champ, comme le reportage sur le travesti de Montmartre qui priait la Sainte Vierge : le lendemain, la moitié du pays en parla, même ceux qui ne l'avaient pas vue. On dira : tout a tenu à une séduction physique ; mais qu'est-ce qu'un physique ? Sur une autre chaîne, un acteur australien dont le buste splendide giclait comme une banane d'une combinaison de caoutchouc noir peinait à intéresser les spectateurs d'une série qui n'avait pas dépassé la saison 2 dans son pays d'origine. D'hésitant, François devint bavard. Assuré, même. Un rien péremptoire. " Ce que j'ai fait, personne n'aurait pu le faire. " Débarrassé de sa prostration initiale, il s'animait de gestes lents et gracieux. Sa voix avait une nuance parigote. Est-ce ce démodé, et la simplicité de son nom, Darré, François Darré, qui semble avoir été porté par des millions de personnes depuis le Moyen Âge, faisant de lui notre égal, égalité rendue flatteuse par la beauté de son visage, qui finirent de charmer les téléspectateurs ? Un conseiller en communication ne lui aurait pas donné de meilleur conseil que sa raie sur le côté. Elle lui gagna les dames bien élevées en plus des hommes admiratifs de son astuce. Le grand public, éveillé par la phrase : " Je suis parti de rien ", apprécia : " J'ai effectué le tour du monde dans des jets privés. " Le commentateur l'appela " le petit prince de Hollywood ". On montra des photographies de lui à Los Angeles en compagnie d'acteurs connus, on diffusa des extraits d'un reportage où des gens du show-business entrent dans un hôtel de Las Vegas, arrêtant l'image sur une voiture, à l'arrière-plan, d'où il sort, son visage, flou mais reconnaissable, entouré d'un cercle rouge. Il parla avec je ne sais quoi de posé, de sérieux, de réfléchi, avec des éclats de vantardise. Les vingt minutes de sa confession achevées, il était devenu aussi durable dans l'imagination du public qu'un personnage de légende. Arsène Lupin, Robin des Bois, François Darré. Sous le défilé du générique de fin, on le vit se frotter les cuisses sous la table, se lever, faire quelques pas malaisés dans sa combinaison trop grande, puis tendre en triangle ses bras nus qui dépassaient des manches courtes de la camisole. Un gardien moustachu lui mit des menottes. " François Darré, l'homme qui a volé trois milliards ! "

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