Méfie-toi

Auteur : Harlan Coben
Editeur : Pocket

Un meurtre, un ADN retrouvé sur la scène de crime et un suspect identifié. Problème, le suspect en question est décédé il y a trois ans...
Il y a trois ans, Myron Bolitar prononçait l'oraison funèbre d'un de ses clients, le légendaire coach de basket Greg Downing. Ces deux-là avaient connu des hauts et des bas : d'abord rivaux sur les parquets dans leur jeunesse, ils étaient devenus associés quand Myron avait lancé son affaire d'agent sportif. Et puis la vie les avait éloignés, jusqu'au décès de Greg.
D'où la stupeur de Myron de recevoir la visite de deux agents du FBI qui lui demandent des nouvelles du défunt. Plus étonnant encore : l'ADN de Greg a été retrouvé sur le corps d'un homme quelques jours plus tôt.
Serait-il encore vivant ? Aurait-il feint sa mort ? Pourquoi ?
Myron a besoin de réponses.
Avec l'aide de Win, son fidèle acolyte, Myron va partir sur les traces de celui qu'il croyait connaître, pour une enquête de tous les dangers...

Traduction : Roxane Azimi
9,30 €
Parution : 25 Septembre 2025
Format: Poche
432 pages
ISBN : 978-2-2663-5089-1
Fiche consultée 123 fois

Extrait

Prologue
Voici comment on détruit quelqu’un.
Debout près de son lit, vous le regardez dormir. C’est un gros dormeur. Vous le savez parce que vous le surveillez depuis six semaines déjà. Vous ne prenez pas de risques. Vous vous préparez. C’est ça, le secret. Rien ne sert de courir. L’anticipation fait partie de la vie. « C’est le voyage qui compte, pas la destination. » Vous avez entendu cette phrase le jour de votre remise de diplôme. Un lieu commun, certes, et pas forcément fondé, mais il est bon de se rappeler lors de ces longues veilles solitaires qu’il peut y avoir de la joie dans l’attente et la monotonie.
Vous savez aussi qu’il aime bien boire un cognac avant d’aller se coucher. Pas tous les soirs, mais presque. S’il n’avait pas bu aujourd’hui, vous auriez reporté. Pas de précipitation. Pas de prise de risques. Avec un peu de patience, on arrive à ses fins pratiquement sans accroc.
À force de le surveiller, vous savez qu’il cache un double de ses clés sous un des rochers factices devant chez lui. C’est comme ça que vous êtes entré chez lui ce matin pour trafiquer son cognac. Et pareil ce soir.
Il n’est pas près de se réveiller.
Au fond du tiroir de sa table de nuit, il garde un pistolet, un Glock 19, dans un étui. L’étui ne s’ouvre pas avec un code, mais avec l’empreinte de son pouce via un capteur biométrique. Comme il est totalement HS, vous prenez sa main et collez le pouce sur le capteur. Le mécanisme de sécurité se met à grésiller et se déverrouille.
Vous sortez le pistolet.
Vous portez des gants. Pas lui, bien sûr. Vous refermez sa main sur le Glock pour qu’il laisse ses empreintes au bon endroit. Puis vous rangez soigneusement l’arme dans votre sac à dos. Vous avez toujours des mouchoirs et des sacs en plastique sur vous. Cela peut servir. Vous frottez sa bouche avec un mouchoir pour récupérer un peu de salive. Vous mettez le mouchoir dans un sac en plastique, et le sac en plastique dans le sac à dos à côté du pistolet. Vous en faites peut-être un peu trop, mais on ne sait jamais.
Couché sur le dos, il continue à ronfler.
Vous ne pouvez vous empêcher de sourire.
C’est cette partie-là que vous aimez. Bien plus que le passage à l’acte lui-même. Tuer peut être relativement simple et assez rapide.
Mais ceci, cette mise en scène, c’est du grand art.
Son portable est sur la table de nuit. Vous le mettez en mode silencieux et le glissez dans le sac à dos. Il est temps de partir. Les clés de son Audi sont suspendues à un crochet près de la porte. Là-dessus, il est méticuleux. Dès qu’il rentre, il accroche ses clés. Vous les prenez et, pour faire bonne mesure, vous attrapez l’une des casquettes de base-ball qu’il garde sur son portemanteau. Vous l’enfilez... Elle est à la bonne taille. Et vous sortez en baissant la tête.
Vous montez dans l’Audi et vous démarrez.
Elle a loué un Airbnb au bord d’un lac dans un coin tranquille à Marshfield. Il ignore qu’elle est là-bas. Vous, vous le savez car, une fois encore, vous avez bien préparé votre coup. Lorsque vous avez découvert qu’elle était partie se cacher, vous avez su que le moment était venu. Vous sortez son portable et tapez l’adresse du Airbnb pour laisser une trace dans ses recherches d’itinéraire.
La maison qu’elle a louée est un cottage au toit pentu. Elle y est depuis une semaine. Vous comprenez les raisons de sa démarche, même s’il ne peut s’agir que d’une solution temporaire. Vous vous garez dans la rue. Il est tard. Deux heures du matin. Mais vous savez qu’elle n’est toujours pas couchée. Vous laissez la voiture devant une maison de vacances inoccupée.
Vous sortez le pistolet de votre sac à dos.
Il y a de la lumière dans la cuisine. C’est là qu’elle doit être.
Vous vous approchez pour jeter un coup d’œil par la fenêtre de la cuisine.
Et la voici.
Assise seule à la table avec une tasse de thé et un livre. C’est une jolie femme. Ses cheveux blond cendré semblent avoir été noués à la va-vite. Elle a replié ses pieds sous elle. Elle est trop maigre, mais c’est probablement le stress. Elle est totalement absorbée dans sa lecture. Elle porte une chemise d’homme trop grande pour elle. Vous vous demandez si c’est une de ses chemises à lui. Ce serait étrange, voire glauque, mais en réalité la vie l’est également.
Sans la quitter des yeux, vous tournez tout doucement le bouton de la porte.
Vous ne voulez pas lui faire peur. La porte est verrouillée.
Vous regardez le bouton. Il est vieux et branlant. Avec des outils, le forcer serait un jeu d’enfant. Vous regardez de nouveau par la fenêtre. Au même moment, elle lève la tête et vous aperçoit.
Ses yeux s’écarquillent de surprise.
Elle ouvre la bouche pour hurler.
Encore une imprudence. Vous avez déjà commis cette
erreur la dernière fois. Malgré toutes les précautions. Et il n’est pas question de recommencer.
Sans hésiter, vous assenez un coup de pied bien placé dans la porte qui cède sans difficulté.
— S’il vous plaît.
Elle se lève et, sans lâcher son bouquin, tend les mains vers vous.
— S’il vous plaît, ne me faites pas de mal.
Vous lui tirez deux fois dans la poitrine.
Elle s’effondre. Vous vous penchez pour vérifier.
Elle est bien morte.
Vous sortez le mouchoir du sac en plastique et le laissez
tomber à terre. Les jurys adorent l’ADN. Ils ont tous été biberonnés aux séries télé qui surestiment les merveilles de la technologie. Ils en réclament au pénal. S’il n’y a pas d’ADN, ils ont un doute sur la culpabilité du prévenu.
Vous ressortez de la maison. Le tout vous a pris quinze secondes.
Les coups de feu ont fait du bruit, c’est certain. Mais les voisins vont penser à un feu d’artifice, à un pot d’échappement défaillant ou à une autre explication anodine du même genre. Néanmoins, inutile de traîner. Vous regagnez en vitesse la voiture. Et tant pis si on vous voit courir. Au pire, ils apercevront un individu avec une casquette de base-ball qui s’engouffre dans une Audi immatriculée à son nom à lui.
À la limite, ce serait encore mieux.

Informations sur le livre