Premier homme

Auteur : Xavier-Marie Bonnot
Editeur : Actes Sud Editions

“Mais quel est ton mythe à toi, le mythe dans lequel tu vis ?” Cette question-là, de Palma ne se l’était jamais posée… Jusqu’à ce qu’il tombe sur l’assassin le plus redoutable de sa carrière. Alors qu’il est à deux doigts de la retraite, le commandant de Palma, “le Baron” pour ses proches, se trouve en effet confronté à une affaire hors normes : une grotte préhistorique, des fresques rupestres millénaires, des meurtres sauvages perpétrés selon un rituel bien précis : une main en négatif comme les chamanes du Paléolithique les dessinaient il y a trente mille ans… Voilà les indices que le flic marseillais doit décrypter pour venir à bout de celui qui s’appelle lui-même “Premier Homme”.
Premier Homme est une vieille connaissance, de Palma l’a déjà arrêté, dix ans plus tôt. Mais il ne sait rien de lui, rien de sa folie, rien de son histoire. Le mettre à nouveau hors d’état de nuire relève d’un étrange défi. Le commandant doit comprendre l’histoire d’un enfant, les secrets de sa famille, les manipulations dont il a été victime… Retourner aux âges premiers de l’humanité. L’époque où les grands chasseurs du Paléolithique vivaient hors de ce qui ronge nos sociétés modernes : la cupidité, la propriété, l’asservissement… La vérité de Premier Homme réside dans les mythes les plus anciens, tracée dans le monde pariétal, dans la nuit d’une grotte dont l’entrée se trouve à au moins trente-huit mètres sous le niveau de la mer. Et qu’il le veuille ou non, le Baron va devoir apprendre à aimer cet enfant devenu le plus terrifiant des meurtriers…

22,00 €
Parution : Janvier 2013
352 pages
Collection: Actes noirs
ISBN : 978-2-3300-1521-3
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Extrait

Le 23 juillet 1970 fut une journée brûlante. Un peu partout, en Haute-Provence, des incendies avaient ravagé des hectares de forêts. La pluie tardait et la nature crevait jour après jour, de feu et de soif.
Sur le chantier des fouilles préhistoriques de Quinson, la lumière ondulait au-dessus des tranchées. En fin d'après-midi quand le soleil déclina vers les montagnes noires qui fermaient la vallée de la Durance, un vent clément, presque frais, descendit depuis les hauteurs du Verdon.
Ce fut à ce moment-là que la mort arriva.
La mort, dans une berline verte qui souleva la poussière ocre en tournant dans la route qui file vers les gorges fraîches du Verdon. Pierre Autran ne pouvait pas savoir et ne se rendit compte de rien. Il jeta un oeil à sa montre et lança en direction du professeur Palestro :
- La journée est finie !
Puis il aligna méthodiquement sa truelle, son racloir et son pinceau sur le rebord d'un gros tamis. Pierre Autran était un homme mesuré en tout ; un homme d'ordre. Le couchant était invariablement l'heure d'une bière. Des canettes glacées attendaient dans le frigo de la cabane, à l'autre bout du chantier. Autran ne se fit pas prier. La terre et le soleil avaient eu raison de sa légendaire sobriété.
Les fouilles se trouvaient à même un plateau de garrigue rauque parsemée de cistes. Plus loin, la pente se redressait vers des falaises grises. Un sentier traversait des combes vertes et des bavures de terre rouge puis se dissimulait entre les chênes-kermès à peine plus hauts qu'un homme jusqu'aux corniches qui conduisaient à la grotte de la Baume Bonne.
Pierre Autran s'appuya sur le flanc d'une brouette encore pleine de gravats. Il tendit une Kronenbourg à Palestre
- À la tienne !
Palestro avait la trentaine. C'était un grand type dégingandé avec les épaules en un V inversé, toujours vêtu d'un pantalon de surplus militaire et le crâne couvert d'un bob sans âge. Il appartenait à l'université d'Aix-en-Provence, département de Préhistoire. Autran était sensiblement du même âge, mais en plus costaud. Il appartenait à ces bénévoles en Pataugas qui râpent la caillasse pour la joie de participer au grand oeuvre de la recherche. L'équipe avait accompli un sacré boulot ! Les excavations coupées au cordeau, semblables à un escalier de géant, pénétraient le ventre de la terre jusqu'au Gravettien*.
En un mois, le chantier s'était considérablement agrandi. Palestro avait demandé de piocher en direction des hauts, vers une brèche en partie comblée, au pied d'une falaise, qui ressemblait à un abri de chasseurs du Paléolithique. Les assistants avaient installé des règles, tendu des fils de niveau ; un géomètre faisait régulièrement le point. Couche après couche, le sol âpre mouchardait des bribes d'histoire. L'homme vivait ici depuis quatre cent mille ans !

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