Rendre le monde indisponible

Auteur : Hartmut Rosa
Editeur : La Découverte

Dominer le monde, exploiter ses ressources, en planifier le cours... Le projet culturel de notre modernité semble parvenu à son point d'aboutissement : la science, la technique, l'économie, l'organisation sociale et politique ont rendu les êtres et les choses disponibles de manière permanente et illimitée.
Mais alors que toutes les expériences et les richesses potentielles de l'existence gisent à notre portée, elles se dérobent soudain à nous. Le monde se referme mystérieusement ; il devient illisible et muet. Le désastre écologique montre que la conquête de notre environnement façonne un milieu hostile. Le surgissement de crises erratiques révèle l'inanité d'une volonté de contrôle débouchant sur un chaos généralisé. Et, à mesure que les promesses d'épanouissement se muent en injonctions de réussite et nos désirs en cycles infinis de frustrations, la maîtrise de nos propres vies nous échappe.
S'il en est ainsi, suggère Hartmut Rosa, c'est que le fait de disposer à notre guise de la nature, des personnes et de la beauté qui nous entourent nous prive de toute résonance avec elles. Telle est la contradiction fondamentale dans laquelle nous nous débattons. Pour la résoudre, cet essai ne nous engage pas à nous réfugier dans une posture contemplative, mais à réinventer notre relation au monde.

Né en 1965, Hartmut Rosa, sociologue et philosophe, est professeur à l'université Friedrich Schiller de Iéna et directeur du Max-Weber-Kolleg à Erfurt,en Allemagne.

Traduit de l’allemand par Olivier Mannoni
17,00 €
Parution : Janvier 2020
144 pages
ISBN : 978-2-3480-4588-2
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Extrait

Faire bon usage du retard ne signifie donc pas ralentir, ou revenir à la lenteur.
C’est un préjugé contre la durée que de confondre la lenteur avec le retard. La durée offre les occasions d’un bon usage du retard sans en passer par la lenteur. De même, un éloge du retard n’est pas un éloge de la patience, mais (…) d’une hâte qui n’a de lien qu’avec les échéances essentielles. Faire bon usage du retard, c’est expérimenter à quel point le temps passe vite quand il est vécu comme cette durée de vie qui est pour ­chacun de nous l’unique vrai don que nous ayons reçu.
La hantise du retard ne permet aucun vrai progrès personnel et collectif. Elle est conservatrice, car elle repose sur une conception conservatrice du progrès, celle qui consiste à l’assimiler à l’ascension d’un escalier. (…) Le temps subjectif est fait d’allers-retours, de suspens, de hâtes et de retards.

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