Le Dernier Thriller norvégien

Auteur : Luc Chomarat
Editeur : Points

Delafeuille, éditeur parisien sous pression, arrive à Copenhague pour acquérir les droits du dernier roman de la star du thriller scandinave. À peine a-t-il entamé la lecture du manuscrit d'Olaf Grundozwkzson que fiction et réalité s'entremêlent de façon assez inquiétante. Un tueur fou rôde, les flics semblent au bord de la crise de nerfs, et une violente tempête de neige couve. Une histoire trépidante et sauvage, à l'humour raffiné.

6,50 €
Parution : Juin 2020
Format: Poche
216 pages
ISBN : 978-2-7578-7675-6
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Extrait

C’était la première fois que Delafeuille se rendait au Danemark. Il était là pour négocier les droits de traduction du dernier opus d’Olaf Grundozwkzson, le nouveau pape du thriller nordique. Des pavés de huit cents pages qui se vendaient comme des petits pains, dans le monde entier. Grundozwkzson était traduit dans pas moins de vingt-six langues. Pas forcément sa littérature préférée, mais Delafeuille avait vendu sa petite maison, il travaillait à présent pour les éditions Mirage, ce n’était pas à lui de décider si le thriller nordique c’était bien ou pas. Les gens de la compta, quant à eux, trouvaient ça formidable.
Cela dit, il reconnaissait au Danois un talent certain pour les intrigues à tiroir, et une capacité unique à créer une ambiance particulièrement effrayante, propice à ramener le lecteur le plus aguerri aux terreurs de l’enfance. Ce n’était pas donné à tout le monde. Mais il voyait aussi dans ces histoires de serial killers, somme toute assez répétitives (et pour cause) une certaine complaisance, notamment dans les interminables scènes de torture et de viol. Chez Grundozwkzson, elles pouvaient s’étendre sur plusieurs dizaines de pages. Même en admettant que le public soit friand de ce genre de choses, ce type devait avoir de terribles problèmes sexuels.
L’avion s’immobilisa en fin de taxiway et l’hôtesse, une blonde longue et ferme, avec une bouche pulpeuse et rouge dans laquelle on avait envie de mordre jusqu’à ce que le sang gicle prononça la formule habituelle :
- Mesdames et messieurs, l’équipe du vol Air Gnoldün 24581 est heureuse de vous souhaiter la bienvenue à Copenhague. Nous espérons que vous avez effectué un agréable voyage et que nous aurons le plaisir de vous accueillir à nouveau sur nos lignes. Il est quinze heures trente heures locale, la température extérieure est de moins vingt degrés. Vous pouvez détacher vos ceintures. Veuillez ne pas quitter votre siège avant l’arrêt complet de l’appareil.
- Comment ça, jusqu’à ce que le sang gicle ? s’interrogeait Delafeuille tout en glissant sa tablette numérique dans son étui de protection. Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
- Qu’est-ce que vous dites ? Interrogea son voisin, un homme au poil ras, à la mâchoire carrée, qui n’avait pas desserré les dents du voyage.
- Vous avez entendu ?
- Oui, nous pouvons détacher nos ceintures.
- Non, pas ça… Une histoire de sang qui gicle.
L’autre le regarda d’un air soupçonneux. Delafeuille eut un sourire gêné, se gratta le cou pour se donner une contenance (et puis ça le grattait).

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