Le Goût du sang

Auteur : Gianni Biondillo
Editeur : Metailié

Un homme quitte la prison de San Vittore. Il est seul, personne ne l'attend. Il a un plan pour échapper à son passé, fait de violences au nom de la 'Ndrangheta, de trafic de drogue, de chantages...

Comment a-t-il pu sortir de prison en toute légalité au bout de quatre ans alors qu'il devait en purger trente, c'est ce que tout le monde se demande, à commencer par l'imperturbable Lanza, au flair aussi redoutable que son humour : craignant une flambée de violence, il alerte l'inspecteur Ferraro qui, bon gré mal gré, comme toujours, part investiguer dans une Milan graduellement ensevelie sous la neige.

De Milan et sa folle course urbanistique aux labyrinthiques quartiers de Naples, en passant par un poussiéreux village calabrais grillé par le soleil, Gianni Biondillo nous régale ici d'une nouvelle enquête de son inspecteur préféré, issu du populaire Quarto Oggiaro en voie de gentrification, et nous emporte avec lui dans une intrigue noire, drôle et émouvante, où tous les protagonistes seront liés par le goût du sang.

Traduction : Anne Echenoz
21,00 €
Parution : Mai 2025
360 pages
ISBN : 979-1-0226-1442-9
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Extrait

Un drap étendu entre les toits et les cimaises, ponctué de faîtes, de conduits de fumée, de merles gibelins, gonflé, lourd, pâle, strié de suie, oppressant, un drap sale, brumeux, prêt à craquer, à s’abattre sur la tête des passants, un suaire infect, exténuant, qui faisait battre les tempes, coupait le souffle, bouchait l’horizon.

Ce fut la première sensation de Sasà dès qu’il eut franchi la porte du bâtiment. Le ciel comme une couverture, un plafond, au-dessus de la place Filangieri. Puis le chantier du nouveau métro, à quelques mètres de la prison. La ville qui change, qui se hausse, qui creuse, qui construit, qui ne s’arrête jamais. Quatre ans de prison et je vais finir par ne même plus réussir à retrouver mon chemin. Et enfin le froid. Il avait les oreilles gelées. La droite, et ce qui restait de la gauche. Il remonta la capuche de son sweat-shirt trop léger, fait pour le printemps. Il n’avait pas eu le temps de se faire apporter un blouson chaud. Pas plus mal, personne ne doit savoir que je respire à l’air libre. Tant qu’on me croit en cage, j’ai tout le temps qu’il me faut, il suffit seulement de bien l’employer. Pas de conneries, se disait-il. Il avait un plan, il l’avait étudié pendant les nuits d’insomnie, les matins dans sa cellule du quartier numéro 4, pendant les heures de promenade. Pas de conneries et tout se passera comme ça doit se passer.

Il décida de partir à pied, au moins jusqu’au terminus de la ligne 57. Il regarda à gauche et reconnut la coupole de San Vittore. Il longea le mur de la prison et, à l’angle de la rue Vico, il cracha par terre en direction de la guérite. Adieu, bande de merdes, oubliez bien ma gueule. Il marchait en bas du trottoir, éprouvant sous ses pieds les pavés qui enserraient les voies du tram. La ville bourgeoise lui faisait face, austère, pénitentielle, borromaïque1
. Au feu, il tourna à droite. Assis sur un ralentisseur en pierre, un putain de nègre de plus de deux mètres semblait l’attendre depuis des heures.

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